Parmi de multiples essais visant à jouer les quatuors de Mozart avec quatre instruments à vent, la participation de la clarinette m’est apparue particulièrement heureuse dans le 22ème quatuor. Mozart a composé cette œuvre entre le quintette KV 581 et le concerto KV 622. En outre, certaines phrases font penser à « la Flûte enchantée », précisément au trio des angelots soutenu par les clarinettes.
Une observation plus générale de la musique symphonique de Mozart ou de Beethoven m’avait fait remarquer que, lors d’échanges de thèmes de l’ensemble des cordes au groupe des bois, les compositeurs associaient volontiers deux clarinettes et deux bassons pour retrouver les quatre parties de la polyphonie dans un timbre fusionnel.
Ma première idée fut de retenir cet effectif. Cependant, au cours d’un déchiffrage, je fus amené à remplacer le premier basson, jouant la voix du violon alto, par un cor de basset. Cet instrument, mozartien entre tous, convient admirablement à cet emploi, placé entre les clarinettes et le basson. La version pour quatuor de clarinettes ( 2 clarinettes en sib, cor de basset ou clarinette alto, clarinette basse) est l’extension de la version précédente. Si la clarinette basse n’apparaît pas dans l’instrumentarium de Mozart, l’unité de timbre créée avec les trois autres instruments restitue, d’une autre manière, le timbre homogène du quatuor à cordes.
Cette édition propose le conducteur pour 2 clarinettes et 2 bassons, puis, sans aucune différence d’arrangement, le conducteur pour quatuor de clarinettes. On peut ainsi, sans inconvénient, mélanger les instruments des deux versions (ex. : 2 clarinettes, clarinette alto et basson 2 ). Le choix des conducteurs reflète, d’une part l’idée première de ma transcription, et d’autre part la commodité d’un conducteur destiné à l’ensemble qui sera sans doute le plus fréquemment réuni. La clarinette basse est notée en clé de fa et clé d’ut sur le conducteur, mais dans les parties séparées, elle se présente dans les deux notations : clés de fa/ut, et clé de sol.
Lorsque l’on étudie les quatuors de Mozart, il apparaît que l’auteur, à partir du 14ème quatuor, enrichit considérablement son écriture, souhaitant rivaliser avec les quatuors de l’opus 20 de Haydn. Simultanément, il fait appel à des tessitures plus larges que les cordes peuvent assumer. C’est totalement le cas du 22ème quatuor. Par conséquent, seuls les bois à la tessiture la plus grande pouvaient convenir (clarinette, basson). Cependant, en conservant le ton original, il eut été dommage de ne pas utiliser les notes les plus graves de la clarinette en sib. De plus, la clarinette, toujours tendue dans une tessiture trop haute, se trouvait confrontée à des sommets de phrases inadaptés à l’instrument.
En définitive, j’ai opté pour l’intervalle de quarte pour transposer vers le bas la partition originale. Cela peut sembler audacieux, mais J.S. Bach est allé jusqu’à l’intervalle de quinte dans une de ses transcriptions pour clavecin.
Ceci posé, le travail de transcription a commencé. Pour les deux clarinettes, il n’y eut que très peu de changements à effectuer. Pour le premier basson, la transposition centrait mieux la partie de violon alto dans la tessiture de l’instrument. Le second basson, parfois trop grave a été remonté à l’octave supérieure quand c’était nécessaire. Curieusement, ceci était souvent réalisable avec beaucoup de naturel. Pour quelques mesures plus délicates à transcrire, la modification du basson 2 entraînait des changements dans la partie de basson 1, et même parfois dans celle de clarinette 2.
Les articulations sont celles des cordes. Les interprètes sont libres de les adapter pour les instruments à vent.
Gérard Chenuet